En collaboration avec une étudiante en Master 2 à la CNAM d’Aix-en-Provence, l’URPS Infirmière a réalisé une étude sur les conditions d’exercice des IDEL.
Cette étude a été faite en deux parties de février à septembre 2017, 286 infirmiers libéraux ont répondu. L’objectif était de mieux connaitre les conditions et le fonctionnement de l’exercice libéral infirmier en région PACA.
PROFIL DES INFIRMIERS LIBERAUX
La profession d’infirmière reste, même dans l’exercice libéral, encore fortement féminine (79 %). Ce chiffre correspond aux statistiques nationales.
Les infirmiers répondants ont majoritairement entre 51 et 60 ans (43%) et entre 41 et 50 ans (32%).
On constate qu’il n’y a que 1% de moins de 30 ans.
La majorité des infirmières (54,5 %) exercent dans une zone urbaine. La zone rurale représente moins de 30 %.
Cela correspond à la densité de la population de la région PACA qui compte une faible part de population rurale.
ORGANISATION DU TRAVAIL
Les IDEL travaillent par 2 (52 %) ou par 3 (26 %) sur une tournée de patients.
Le nombre d’infirmiers installés ne correspond pas au nombre de patients pris en charge car ces statistiques ne prennent pas en compte le travail en équipe.
Le roulement que l’on retrouve le plus chez les IDEL est petite semaine/ grande semaine (60 % des répondants). L’organisation petite/grande semaine correspond à 2 jours de travail sur une semaine, et 5 jours de travail sur la semaine suivante.
Le temps de travail hebdomadaire moyen est de 53h pour la grande semaine et 25h pour la petite.
30% des infirmiers travaillent selon le roulement semaine entière/semaine repos. Le temps de travail moyen pour ce roulement est de 68h pour la semaine entière.
En dehors du temps de travail déclaré, les IDEL passent en moyenne 6h30 par semaine aux tâches administratives (secrétariat, télétransmissions).
Il est difficile de savoir quel est l’équivalent temps plein d’une IDEL par rapport à une IDE salariée.
La moitié des infirmiers libéraux prend entre 3 et 4 semaines de congés annuels (55%) et un tiers prend seulement entre 10 et 15 jours par an (34%).
Les infirmières ont en moyenne 20 patients par jour. Un patient peut représenter jusqu’à 4 visites par jour.
Dans une journée de travail, les infirmiers passent en moyenne 81% du temps auprès des patients et 19% en trajet.
Auprès du patient, 91% du temps est utilisé pour les soins et 9% pour la coordination des soins.
Les IDEL déclarent en majorité n’effectuer que très rarement des soins au cabinet, voire aucun.
Les horaires d’ouverture des cabinets sont :
- Ouverture entre 6h et 7h (95%)
- Fermeture entre 12h et 13h (83%)
- Reprise entre 16 et 17h (84%)
- Fermeture à 20h (75%)
La combinaison la plus fréquente d’ouverture de cabinet est de 7h à 13h puis de 17h à 20h.
Cela correspond en moyenne à 9h d’ouverture de cabinet par jour. Les horaires d’ouverture du cabinet sont les horaires durant lesquelles les infirmiers effectuent leur tournée. Même si très peu de soins sont réalisés dans le cabinet infirmier, les IDEL essaient de respecter ces horaires d’ouverture.
Les infirmiers reçoivent des appels de patients entre 21h et 6h à une fréquence de 2 à 12 fois par an (70% des répondants). Ces appels concernent principalement des perfusions, des décès ou des angoisses des patients et/ou des proches.
76% des infirmiers pensent que ces appels ne peuvent être évités. Les infirmiers sont obligés d’assurer la permanence de soins et répondent ainsi à ces appels de nuit.
Seul moins d’1 % des infirmiers libéraux déclare ne pas utiliser de dossier de soins. Ils utilisent principalement un dossier de soins papier (94%).
L’utilisation de l’ordinateur est essentielle pour les infirmiers, 98% d’entre elles l’utilisent pour la gestion de leur exercice (notamment pour les télétransmissions et la gestion d’informations médicales)
FORMATION
82% des interrogés déclarent avoir participé à un programme DPC au cours des 12 derniers mois.
Les personnes n’ayant pas participé à un programme DPC au cours de l’année déclarent que les thèmes ne sont pas intéressants et/ou non adaptés aux besoins ou évoquent un manque de temps pour se former.
ORGANISATION ENTRE PROFESSIONNELS
Les IDEL collaborent avec :
- Le médecin traitant (plus de 97% de réponse positive) et les autres professionnels de santé (86%) : les infirmiers collaborent surtout avec les masseurs-kinésithérapeutes, ainsi que les pédicures podologues, orthophonistes, pharmaciens et médecins spécialistes.
- Les structures : les infirmiers libéraux collaborent avec les hôpitaux, les SSIAD et les réseaux, ainsi que les prestataires de service.
- Le secteur médico-social : 87% des infirmiers collaborent avec les services d’aide à domicile.
Les infirmiers à domicile ne déclarent pas collaborer avec les CLIC (79% de réponse négative) ni l’HAD (75%). Les CLIC (Centres Locaux d’Information et de Coordination) sont méconnus des IDEL et travaillent peu avec eux.
Les relations avec les services d’HAD (Hospitalisation A Domicile) sont un peu conflictuelles (détournement de patientèle, tarification imposée, etc).
Les infirmiers interrogés déclarent que le dispositif de « médecin traitant » n’a pas changé leurs modalités d’exercice (Non à 79%).
Ce dispositif de médecin traitant est jugé satisfaisant pour 64 % des IDEL mais seuls 47% pensent que la coordination relève du rôle du médecin généraliste. Les infirmiers s’occupent de la coordination des soins à 9% du temps de prise en charge.
Les IDEL qui exercent dans les zones rurales pensent que les professionnels se connaissent bien à 67%. A l’inverse, 56% des IDELS exerçant dans les zones urbaines trouvent que les professionnels ne se connaissent pas bien entre eux.
Les IDEL estiment que leur nombre est suffisant pour le territoire dans lequel elles interviennent (76%) et que le rôle de chacun des intervenants est bien défini (Oui à 61%).
Les problèmes restent majoritairement liés à la transmission des informations : les professionnels n’ont pas suffisamment de temps pour se coordonner (72%) et le retour d’information n’est pas bien organisé (66%).
On remarque que les infirmières effectuent la coordination des soins : elles collaborent avec le médecin traitant, les autres professionnels de santé, l’hôpital, les autres structures et le secteur médico-social.
Cette coordination représente environ 9% de leur temps de travail et elles considèrent qu’elle ne relève pas du rôle du médecin traitant.
Les infirmières manquent pourtant de temps pour se coordonner et ne sont pas rémunérées lorsqu’elles le font.
INFIRMIERE TYPE
L’infirmière type est de sexe féminin, travaille dans les Bouches-du-Rhône, en zone urbaine.
Elle a une file active d’une vingtaine de patients dont le rythme de travail est petite/grande semaine dans un équipe de 2 et presque exclusivement à domicile.
Elle travaille en moyenne 9h par jour, dont 1h45 en déplacement et passe un peu plus de 6h par semaine en tâches administratives.
Elle prend entre 2 et 4 semaines de congés par an.
Elle a un ordinateur pour effectuer la facturation et les télétransmissions.
Elle est joignable 24h/24. La nuit, elle se déplace pour un problème de perfusions, de décès et pour répondre aux angoisses des patients et des proches.
Elle se forme annuellement avec un programme DPC.
Elle collabore et assure la coordination avec les autres professionnels du domicile : médecin traitant et services d’aide à domicile. Elle collabore également avec le masseur kinésithérapeute, le pharmacien et le pédicure-podologue, particulièrement pour la prise en charge des personnes âgées.
Elle travaille peu avec l’HAD.
Elle pense ne pas bien connaitre les autres professionnels et considère que le rôle de chacun est bien défini.
Elle utilise un dossier de soins infirmiers papier.
PROJETS EN COURS
L’URPS Infirmière PACA a souhaité interroger les IDEL de la région afin de connaitre les conditions et le fonctionnement de leur exercice libéral.
A partir des informations recueillies, l’URPS s’est fixée comme objectif d’interpeller les pouvoirs publics sur la place et le rôle de l’IDEL dans le système de soins. Il s’agira de faire remonter les dysfonctionnements liés à leur pratique et proposer des projets aux institutions.
Cette enquête révèle que 94% des IDEL ont recours à un dossier de soins papier. La Stratégie Nationale de Santé 2018-2022 encourage le déploiement d’outils numériques. Ils permettront aux professionnels de dégager du temps et ainsi améliorer la qualité du service au patient, la pertinence et la qualité des soins. En tant qu’instance représentative des 16.000 IDEL de la région PACA, l’URPS entend répondre aux problématiques rencontrées au quotidien par les IDEL et notamment celle liée à la transmission des données et à la coordination. L’URPS élabore actuellement un outil de partage d’information et de coordination entre les professionnels. Cet outil permettra entre autres aux IDEL de s’intégrer pleinement au sein des PTA et de faciliter les échanges entre professionnels du sanitaire et du médico-social.
A travers ce questionnaire, nous apprenons également que 70% des répondants reçoivent des appels de patients entre 21h et 6h, pour satisfaire à l’obligation de permanence des soins. 76% des infirmiers pensent que ces appels ne sont pas évitables et nécessitent l’action d’un professionnel de santé. Pour améliorer le travail des IDEL et garantir la sécurité des soins aux patients, l’URPS expérimente un projet d’astreinte de nuit. Il s’agit d’organiser des soins infirmiers de nuit à domicile afin d’apporter une réponse à des urgences : Les IDEL seront en mesure d’intervenir chez un patient la nuit et pourront agir en tout autonomie grâce aux protocoles de soins établis afin d’éviter des hospitalisations.