En France, l’arrêté du 6 avril 2011, définit les médicaments à risque comme des «médicaments requérant une sécurisation de la prescription, de la dispensation, de la détention, du stockage, de l’administration et un suivi thérapeutique approprié, fondés sur le respect des données de référence afin d’éviter les erreurs pouvant avoir des conséquences graves sur la santé du patient (exemples : anticoagulants, anti arythmiques, agonistes adrénergiques IV, digitaliques IV, insuline, anticancéreux, solutions d’électrolytes concentrées…). Il s’agit le plus souvent de médicaments à marge thérapeutique étroite ».
À l’étranger, les médicaments à risque, sont plus connus sous l’appellation «High-Alert Medications».
Principaux enjeux
- La bonne dose : utiliser des données précises sur le patient comme le poids, la taille, l’âge, les fonctions vitales ; les erreurs de dose représentent 37% des incidents : vérifier la prescription.
- Le bon débit : beaucoup de ces produits sont administrés à l’aide de pompes, pousse-seringues, etc… aux fonctionnalités différentes nécessitant des ajustements continus de la part des IDEL.
- La bonne technique d’administration : les voies multiples peuvent être à l’origine d’erreur ; des rappels de bonne pratique sur la longueur du cathéter, le type de cathéter, le rinçage, etc… doivent être réalisés.
- La bonne durée : le bolus doit être injecté en un temps déterminé, les résultats montrent que trop souvent l’injection est réalisée en moins de 3 min ; la durée de la perfusion doit être indiquée.
- Le bon produit : de nombreuses publications listent les médicaments à risques.
- La classe des AVK est largement documentée pour ses évènements indésirables et son implication sur le nombre de réadmissions. Ils présentent le plus haut risque d’EM lié à l’administration (76%) et dans plus d’1/3 des cas ces erreurs seraient évitables par un simple contrôle à l’administration. Idem pour les AOD hors AMM.
- La classe des antibiotiques et celle des analgésiques représentent à elles seules 50 % des EM.
- L’OMS a répertorié l’erreur de concentration du chlorure de potassium parmi les 9 erreurs à prévenir dans le domaine de la lutte contre les événements iatrogènes.
Préconisations
- Identifier tous les médicaments à risque (à partir de la littérature et de son propre retour d’expérience).
- Restreindre les gammes de pompe pour prévenir les erreurs d’utilisation et les erreurs de programmation. Les procédures doivent être connues des professionnels (voir avec le prestataire ou le pharmacien).
- Etre certain de la formation des IDEL au bon usage de ces médicaments.
- Des protocoles spécifiques harmonisés et standardisés pour chaque produit doivent être appliqués. Ils sont écrits et facilement consultables.
- Mettre en place des prescriptions protocolisées pour certains produits : Chlorure de potassium.
- Standardiser et limiter le nombre de concentrations disponibles. Sauf cas spécifiques, supprimer les électrolytes concentrés.
- Développer l’utilisation de solutions diluées prêtes à l’emploi, notamment pour les électrolytes.
- Le suivi des patients doit être spécifique avec des indicateurs précis comme l’INR, la kaliémie, la glycémie, la tension artérielle, ces seuils d’alertes doivent être connus des IDEL.
- Préparer les injections dans une aire appropriée, si possible à l’abri des interférences (appels, conversation, télévision, etc…)
- S’assurer de la mise à disposition en cas d’urgence d’antidotes avec leurs protocoles associés.
- Des outils de calcul de dose simples doivent être mis à la disposition de l’IDEL. Vérifier son calcul de dose, les programmations de pompes, les lignes de perfusion.
Focus sur les électrolytes, l’insuline et les anticoagulants
- Retirer la prescription d’électrolytes dont la concentration est supérieure à 0,9% pour le chlorure de potassium, le phosphate de potassium et le chlorure de sodium, si c’est possible. Si nécessité absolue à les garder, les ranger séparément et étiqueter de manière lisible le contenant (ex : produit dangereux).
- Mettre en place un process de vérification de la préparation.
- Surveiller régulièrement le passage de la perfusion.
- Une étiquette « doit être dilué » est apposée en supplément sur le contenant. Ne pas injecter ce produit hypertonique par une autre voie que la voie veineuse et en respecter les règles de sécurité.
- Rappel : Présence d’un bandeau bleu pour les solutions hypertoniques
- Les doses et injection sont réalisées à l’aide d’une seringue à insuline ou autre dispositif spécifique (stylo, pompe, etc…).
- La prescription indique clairement le nom de l’insuline, son type d’action (rapide, lente, semi-lente) et le terme «unité» sans abréviation pour la posologie.
- Mise en place d’une double vérification : nom du produit, concentration, dose, réglage de la pompe si besoin, voie d’administration et patient.
- Éduquer le patient dans une perspective d’autogestion en fonction de ses capacités.
- Eduquer le patient à un contrôle de sa glycémie capillaire, ou quelqu’un de son entourage, en cas de malaise.
- Penser à coordonner la distribution des repas avec la prise de l’insuline et non pas l’inverse.
- Attention aux conditionnements à dose élevée d’héparine.
- Attention aux conditionnements à dose élevée pour les formes fractionnées.
- Demander au prescripteur des protocoles de bonne pratique. Il peut définir des valeurs de dose limite.
- Clarifier les doses d’anticoagulant si traitement chez un enfant.
- Planifier la surveillance afin de réévaluer les doses.
- Éduquer le patient et s’assurer de sa bonne compréhension (recommandations pour le rasage, le jardinage, etc…)
- Les prescriptions d’héparine doivent inclure la dose calculée et la dose par unité de poids ou de la surface du corps pour faciliter une contre-vérification indépendante du calcul par un pharmacien, infirmier(ère) ou les deux.
- Le poids (en kg) du patient est l’élément qui sert au calcul de dose des HBPM.
- Ne pas réintégrer dans le stock les comprimés coupés et non identifiables. Ne pas « déblister » les comprimés
- Lecture de l’INR si disponible avant administration de l’AVK (voir avec le prescripteur pour faire varier la dose si dosage trop élevé INR égal ou > 6).
- Avant le début d’une perfusion d’héparine et à chaque changement (rare au domicile), faire une vérification indépendante des 5 B.
- Établir un protocole antagoniste lorsque c’est possible.